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Le risque de l'interculturel en entreprise


L'ère est à la culture de l'échange, du trans.... de l'inter..., du brassage.... le tout sous fond d'expressions politiquement correctes. Terminé les "diners de têtes" ; aujourd'hui la société est riches de ses différences et elle l'affirme, le revendique, parle de complémentarité là où hier, elle parlait d'exception, voire d'anomalie pour mieux revenir à ses fondamentaux. C'est l'interculturel.

Quand il s'agit d'interculturel nous parlons bien sur de culture. Celle-ci s'entend au sens large mais ici nous parlons de la culture en entreprise, comment elle se traduit, comment elle se vit, comment elle se gère d'un point de vue managérial.

La culture c'est l'identité, les codes comportementaux, les rites et symboles, les valeurs , la vision, le sens commun. Tous ces éléments qualifient un groupe que ce soit au niveau ethnique, social, géographique, professionnel. Chaque individu du groupe adopte ces caractéristiques d'appartenance qui constituent un élément de sa personnalité, voire qui la façonne. Les sociétés humaines sont plutôt mono-culturelles en ce sens que l'individu appartient à un groupe social à sa naissance, dans un lieu déterminé et cette appartenance est déclinée par la suite dans d'autres groupes qui ont la particularité de reproduire la culture du groupe d'appartenance initial de chaque membre, groupe d'appartenance initial qui est le même pour tous les membres.Sauf que ce modèle, qui résiste depuis des millénaires, est aussi écorné depuis des millénaires... de temps en temps... et qu'aujourd'hui nos sociétés ont décidé de faire de l'interculturel, le modèle social. C'est une progression... au moins sémantique. Qu'en est-il sur le plan de l'entreprise ? Force est de constater qu'au delà des discours, la réalité managériale et collaborative aborde l'interculturalité sans évidence, pour ne pas dire sans outils, sans moyens. L'ère est aussi à l'injonction paradoxale : débrouillez-vous pour ouvrir ! Ne serions-nous donc pas convaincu par le discours ? Ouvririons-nous par convenance ? Ca ressemble à cela et c'est alors que l'interculturel, action hautement risquée, devient dangereuse.

Elle devient dangereuse car nous savons que le dire n'engendre pas automatiquement l'action. Que les croyances sont des freins immenses à toute forme d'évolution. Que les uns rejettent la culture parce qu'ils pensent qu'elle étouffe leur individualité. Que les autres l'encensent parce qu'ils pensent qu'il faut appartenir à.... pour être. Nous sommes déjà dans un choc des visions ; le choc des cultures n'est est que renforcé.Il se traduit en entreprise lors de fusions, lors de l'expatriation et de son retour, lors du développement international et plus quotidiennement lors des recrutements et du management individuel et collectif. Soudain, les salariés doivent cohabiter, travailler avec les salariés du concurrent d'hier, ils doivent être performants dans un nouveau pays, il doivent vendre leur produit à l'étranger, on leur demande de recruter des profils qui sortent de l'ordinaire et bien entendu de toujours manager leur équipe ou de collaborer avec efficacité. On leur explique que c'est ce qu'il faut faire et que c'est bien pour l'entreprise. On y met un vernis d'humanisme et doucement on passe à la notion de diversité en assimilant les deux alors même que l'interculturel n'est qu'un aspect de la diversité. Et puis plus personne n'y comprend rien. Les salariés et manageurs savent seulement qu'ils doivent faire, sous peine d'être condamnés. Donc ils font.... parfois bien.... souvent mal. Pourquoi mal ? Certainement pas parce qu'ils n'y croient pas, ou qu'ils veulent majoritairement conserver leur culture. Ils font mal parce qu'avec l'injonction de l'interculturel, s'est installée la politique de l'autruche qui consiste à nier les problèmes d'interculturalité et ainsi supprimer les lieux pour en parler. Nous n'avons plus le droit de dire que l'autre pose problème, que sa façon de faire, d'être ne convient pas ou est difficile à gérer. La façon de faire ou d'être de l'autre doit être à tout prix acceptée. Dans ce contexte, l'interculturel ne reste qu'un risque. Et que fait le salarié ou le manager désarmé face à un risque ? Il y a celui qui décide vite pour se débarrasser du problème, il y a celui qui met un temps infini pour décider, il y a celui qui ne décide plus.Derrière cette décision tronquée, se profile des problèmes managériaux, de communication, de collaboration, d'acceptation, d'analyse.... qui remettent en question les fondements même de l'interculturel. Cette démarche est dès lors perçue comme une obligation, un effet de mode, que personne n'intègre vraiment tant sur le plan de la collaboration, que de l'innovation ou du management. Ce sont des fusions qui se passent mal humainement et sur le plan organisationnel et fonctionnel pour l'entreprise, c'est le développement international qui avorte voir compromet l'entreprise. C'est le retour d'expatriation ou l'expatriation elle-même qui ne permet pas au salarié d'être valorisé, c'est l'arrivée d'un salarié "atypique" dans une équipe qui ne l'accueille pas, voire s'oppose à lui. C'est surtout le corps social qui se replie sur lui-même et mène une guerre sourde à cette interculturalité subie car incomprise.Comment se sortir de tels scénarios ? Pas de recette miracle sans doute. Un élément propre à toute démarche : elle doit être pensée, organisée, expliquée et accompagnée dans sa mise en oeuvre. Accompagnée pour permettre l'apprentissage d'une autre forme de travail, de pensée de collaboration, de management,... accompagnée pour créer, maintenir des lieux neutres de questionnement, accompagnée pour braver les évidences, accepter d'être dans le changement et passer de l'interculturel comme une contrainte supplémentaire à l'interculturel comme une ressource pour soi et pour l'organisation.

Sabine Vansaingèle


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